NON ! l’intérêt à agir du voisin contre une autorisation d’urbanisme ne disparaît pas
Dans une décision récente, le Conseil d'Etat apporte des précisions sur l'intérêt à agir d'un requérant, notion qui a fait l'objet d'importantes jurisprudences depuis la création des articles L.600-1-2 et L.600-1-3 du code de l'urbanisme.
Depuis 2016, le voisin immédiat d’un terrain sur lequel un permis de construire a été délivré bénéficie, en principe, d’un intérêt pour agir à l’encontre de cette décision (CE, 13 avril 2016, Bartolomei, req. n° 389798).
Le voisin doit dès lors faire état d’éléments suffisamment précis et étayés susceptibles d’affecter directement les conditions d’occupation, d’utilisation ou de jouissance de son bien.
Lorsque la situation du voisin évolue, garde-t-il cette qualité pour agir contre l’autorisation d’urbanisme ?
En effet, le contentieux des autorisations d’urbanisme a très souvent une durée particulièrement longue entre le recours gracieux et le jugement statuant sur la légalité du permis de construire (presque deux ans peuvent intervenir).
Il arrive qu’au cours de cette période, le voisin vende son terrain à proximité du terrain d’assiette du projet.
Le projet peut également évoluer dans son gabarit et ses caractéristiques ce qui conduit la future construction à ne plus impacter le voisin.
D’autres constructions peuvent émerger entre le bien du requérant et le terrain du projet, supprimant ainsi la vue qu’avait le voisin sur le projet querellé.
C’est le cas dans l’espèce de la décision commentée. En première instance, le juge des référés a estimé que la construction d’une résidence de tourisme sur le terrain situé entre celui du requérant et le terrain d’assiette du projet contesté, faisait perdre son intérêt à agir au voisin.
Le Conseil d’Etat a censuré cette appréciation et est venu préciser l’appréciation de cette notion dans le temps.
L'intérêt à agir d'un requérant s'apprécie à la date de l'affichage de la demande de permis de construire en mairie (solution classique reprise dans le code de l’urbanisme à l’article L.600-1-3) mais (et c’est l’apport de la décision) le requérant ne peut pas perdre, par la suite, son intérêt à agir.
Le Conseil d’Etat estime que les conditions d'occupation, d'utilisation et de jouissance du bien sont appréciées uniquement à la date d'affichage de la demande en mairie.
Dès lors la réalisation d’autres projets ou la vente du bien par le requérant, ne peut avoir pour effet de faire perdre au requérant son intérêt à agir dès lors qu’il avait cette qualité à la date d'affichage en mairie de la demande.
Conseil d’Etat 21 septembre 2022, Société Maison Camp David, req., n° 461113 Mentionné aux tables
https://www.conseil-etat.fr/fr/arianeweb/CE/decision/2022-09-21/461113
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